Je rêvais de vous écrire...

'Angel'
de François OZON

avec Romola GARAI, Sam NEILL, Chralotte RAMPLING...


Très cher monsieur François OZON,

J’ai eu peur tout d’abord en voyant votre bande-annonce : le titre,‘Angel’ écrit en lettres roses brillantes, une jeune femme dévalant les escaliers dans une robe froufroutante et une voix off encombrante.

Je vous l’avoue, j’ai eu peur que vous me déceviez car après ‘Le Temps qui Reste’ ou même ‘Swimming Pool’, vous aviez placé la barre haute.

Et puis, Monsieur Télérama a eu la bonté de m’inviter à votre avant-première (enfin vous n’y étiez pas en personne quand même, on est en province…) alors je me suis lancée (car n’est-ce pas déjà à des avant-premières que j’ai découvert ‘Walk The Line’, ‘Match Point’ ou ‘Brokeback Moutain’ ?)

Mais la peur est revenue lorsque à nouveau le titre s’est inscrit sur l’écran avec ses lettres dignes des romans de gare. Les cinq premières minutes furent étranges. Votre héroïne m’agaçait au plus haut point : son regard prétentieux, ses petites manies, sa négation des autres et du monde qui l’entoure. Et puis, un je ne sais quoi à fait que j’ai finalement fini par l’apprivoiser. Non pas l’aimer, c’était encore trop tôt.

Elle était étrange: enfant, elle se prenait pour une adulte et une fois adulte agissait comme une enfant. Sa faculté à se réfugier dans son propre monde qu’elle se fabrique au fur et à mesure était impressionnante.
Car le kitsch, entr’aperçu auparavant , c’était cela : les clichés dont elle s’entoure. Tout y est superficiel et apparence. Ce qui pourrait la troubler dans son idéal, elle le modèle. Le chien est mort, tant pis, un autre de la même race l
e remplacera sous le même nom. Sa mère est épicière, non ce n’est pas assez bien, elle vivra, elle aussi, dans la maison de Paradis (Paradise House) achetée par sa fille.


Même pour séduire, elle emploie des mots tout faits, sortis de ses livres. Et ça marche.

Fait-elle alors la différence entre les deux ? A t-elle véritablement du talent ? Vous laissez, monsieur OZON, ces questions en suspens car vous ne manquez finalement pas de cruauté envers elle. Néanmoins un personnage ose dire à votre héroïne que le public aime ses livres car Angel n’écrit pas pour eux mais pour elle-même. Oui, Angel est naturellement égoïste et finalement ne connaît pas grand chose à la vie. « Tout sort de mon imagination » répond-elle quand on lui demande comment elle réussit à imaginer des lieux où elle n’a jamais été ou des sentiments qu’elle n’a jamais éprouvés.

Malheureusement, la réalité va la rattraper : la guerre. Comme une enfant, encore une fois, elle essaye de s’en couper, de continuer comme si rien n’était.
Elle réinvente si bien son monde que je vous avoue avoir eu, quelques instants, un doute sur cette guerre. Mais laquelle est-ce ? La seconde vraiment ? Angel a réussi à m’emmener dans son délire.
Mais son mari, celui qui peint ses belles fleurs qu’avec des couleurs ternes, comme si elles étaient fanées, le lui rappelle.

Alors, oui, Monsieur OZON vous avez réussi. Je l’ai aimé votre Angel . J’ai aimé ce personnage manipulateur qui se sert des autres. J’ai aimé cette arriviste qui joue en permanence sa vie tel ses propres personnages de roman. Je l’ai admiré pour sa force de conviction, son idéalisme. Je me suis rangé à l’avis du personnage de Charlotte RAMPLING . Angel a réalisé ses rêves : carrière, amour, idéaux… Et vous devez le savoir aussi bien que moi, monsieur OZON, qui ne rêverait pas d’en faire autant ?

Alors monsieur OZON, je ne sais pas qui à réaliser la bande-annonce de votre film, mais, sans lui faire de tort, je vous conseille néanmoins de ne plus faire appel à lui à l’avenir.

Car je pense que je ne serai pas la seule à me faire avoir. Pas la seule à avoir cru au sérieux de la réalité d’Angel. A ne pas y avoir compris la distance, l’ironie, le 2nd degrés parfois que que vous avez placé dans votre film. Cette bande-annonce aurait du évoquer les scènes parodiques par exemple. Ou encore montrer que votre film ne se concentre pas seulement sur la période dorée de la vie de votre héroïne. Oui, celle-ci verra aussi son univers merveilleux s’effondrer autour d’elle. Sa forteresse ne tiendra pas indéfiniment.
Elle finira, même, en essayant de se protéger de l'extérieur, par friser le ridicule. Les contrastes entre elle et les autres seront alors encore plus forts.
Elle finira par passer à côté de la réalité de sa vie.

Mais je n'en dirai pas plus, qui sait qui pourrait lire cette lettre et découvrir des détails qui lui gacherait le film...

Alors, je vous dirai juste merci, monsieur OZON. Merci d’avoir réussi encore une fois. De m’avoir convaincue malgré mes doutes. Pour cette héroïne que je ne suis pas prête d’oublier….

Cordialement (Oui, paraît-il que c’est ainsi que l’on doit finir ses lettres dans la bonne société)


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Une utilité publique

'Les Témoins '
de André TECHINE

avec Emmanuelle Béart, Michel Blanc, Sami Bouajila, Julie Depardieu et Johan Libéreau




Oui, pour ce film, il faut que je vous embete avec le nom de tous les acteurs, le nom de tous les personnages principaux. Il sont tous importants. Se croisent sans cesse, traversent différentes saisons pour finir par voir tous leurs vies se croiser.

Il y a des films comme ça qu'on pourrait juger d'utilité publique tout simplement parce qu'il serait utile à toute personne de s'en imprégner, d'en ressortir (au moins un minimum) pertubé par le sujet.
L'histoire est simple, Le sujet que l'on connait d'avance tarde à venir pour surprendre encore plus: l'arrivée du sida dans les année 80 et sa propagation soudaine.

C'est à travers le personnage de MANU, jeune homme homosexuel, débarquant à Paris pour voir sa soeur, apprentie chanteuse lyrique, que TECHINE noue son intrigue.

Oui, on pourrait d'abord percevoir ce film comme n'importe quelle tragédie. Après "Les Beaux Jours" (le film est divisée sous forme de trois chapitres), les choses s'accélérent et arrive le temps de "La Guerre". Bons chronologiques, ellipses et surtout vitesse de la propagation dans le corps de MANU. Vitesse aussi de son isolement mais omniprésence du personnage dans l'esprit des autres.
Car bien que MANU soit celui par qui, on pourrait le dire comme cela, tout arrive, il n'y a néanmoins aucun personnage principal dans le film.

"Le centre de l'histoire se déplace tout le temps, comme la vie" dit SARAH (Emmanuelle BEART).

Et ce sont ces questions de vitesse que l'on se pose à la sortie du film. A quelle vitesse doit-on vivre sa vie? Prendre le temps? Ou en savourer le maximum le plus vite possible?
C'est en ça que ce film ne tourne pas à la tragédie.



"A l'instar des personnages, le film tâche de lutter contre les ténébres, de donner du sens et luminosité à l'expérience humaine" me confirme un ami de chez TELERAMA.

"Une apologie du désir du bonheur" en dit un autre.

Leurs mots sont plus justes que les miens.


Ressortir. Etre heureux qu'un tel film ait été fait.
L'engagement personnel et collectif, la place des autres dans notre vie, l'attirance et l'affection. Se rendre compte qu'on n'imaginait pas vraiment cette maladie de la sorte.
Oui, un film sur le deuil optimiste, étrange non?

Alors respirer un grand coup et marcher d'un bon pas.

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